La science et la politique, Peppino Terpolilli*

*Peppino Terpolilli est mathématicien, membre du comité de Progressistes

Article paru dans le numéro 32 de progressistes (avril-mai-juin 2021)

Aujourd’hui, l’humanité affronte de sérieux problèmes qui nécessitent les sciences pour mieux les comprendre et l’action politique pour proposer des solutions. Ce sont les problèmes de santé publique avec la pandémie de la covid-19, du dérèglement climatique d’origine anthropique et de la nécessaire transition énergétique ainsi que de l’accès aux ressources minières.

La science produit dans divers domaines des lois et des théories qui peuvent être contre-intuitives. Un exemple : jusqu’au XVIIe siècle, on a cru que le mouvement était dû à l’application d’une force sur l’objet qui se déplaçait. En fait, la loi d’inertie découverte par Galilée nous enseigne que la force fait varier le mouvement, et correspond donc à une accélération qui fait varier la vitesse. Cet écart entre les lois mécaniques et les problèmes matériels usuels nous indique que l’« application » des sciences n’est pas immédiate. Les technologies sont l’art d’accommoder les sciences aux problèmes concrets de tous les jours.

L’exemple mentionné, issu de la physique, est en fait bien simple par rapport aux problèmes posés par l’évolution du climat ou des pandémies. Ces situations nécessitent le concours de diverses sciences et connaissances pratiques pour établir des constats, ou encore des prévisions utiles à l’action politique.

Une confusion est souvent faite entre science et recherche : la science est un ensemble de connaissances, de lois qui sont aussi prouvées par leurs efficacités dans les applications. Et on parle de recherche lorsque surgit ou est identifié un problème nouveau qui échappe aux connaissances du moment et qu’il faut affronter. Dans cette situation, il arrive souvent que les experts ne soient pas d’accord entre eux.

Pour traiter de ces situations complexes, l’action politique a besoin des résultats des sciences et des technologies. Or leur traitement est aussi tributaire de l’opinion publique, qui se forme à travers les institutions démocratiques et l’action des partis, mais également par l’action des médias et, de plus en plus, à travers les réseaux sociaux.

Les convictions des citoyens peuvent être influencées par quiconque intervient sur ces réseaux. Il faut rappeler que la science n’est pas de type référendaire : l’opinion « majoritaire » ne fait pas les lois, pas plus qu’elle ne détermine les faits scientifiques. Malheureusement, l’éthique scientifique n’a pas toujours été respectée lors des débats sur les traitements de la covid-19.

Les articles qui constituent ce dossier éclairent la complexité des relations entre la science et la politique, et nous rappellent que les choix scientifiques et politiques sont souvent influencés par des questions d’intérêts, comme le démontrent en particulier les difficultés non surmontées pour parvenir à l’ouverture des brevets afin de permettre une couverture vaccinale mondiale, nécessaire à l’éradication de la pandémie.  

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