Livres (N°8)

Science et Culture. Repères pour une culture scientifique commune 

OUVRAGE COLLECTIF COORDONNÉ PAR JACQUES HAÏSSINSKI ET HÉLÈNE LANGEVIN-JOLIOT 

Apogée, « Espace des sciences », 2015, 160 p. 

n91Voici un livre bienvenu par les temps qui courent, où la spécialisation croissante des sciences tend à les transformer en savoirs réservés aux experts. Or rien n’est plus éloigné de cet ésotérisme de facto que la vraie science, celle d’une compréhension du monde qui nous entoure, intégrée dans une culture vivante et rationnelle, propre à nous situer dans la société, à nous informer en vue de choix qui engagent notre futur et celui de nos descendants. 

Ce livre, fruit d’une réflexion collective au sein de l’Union rationaliste, ne constitue nullement une quelconque encyclopédie ; il est plutôt une collection de clés nous aidant à situer, à jauger, à comprendre les relations entre des connaissances ponctuelles, ou leur histoire. 

L’ouvrage est abondamment illustré. L’introduction, « Pour une culture générale scientifique », expose constats et objectifs, et présente les trois parties qui suivent. La première porte sur les concepts et les méthodes de la science. La deuxième rassemble des connaissances de base pouvant servir d’ancrage à l’enrichissement ultérieur de la culture scientifique de chacun. Un choix de textes ponctuels constitue la troisième partie, illustrant par des exemples la façon dont la science se construit et s’insère dans la culture.


Terres d’ailleurs. À la recherche de la vie dans l’Univers

ANDRÉ BRAHIC ET BRADFORD SMITH
Odile Jacob, 2015, 448 p. 

André Brahic est astrophysicien, professeur à l’université Paris-Diderot et au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives. 

Mise en page 1Il a découvert les anneaux de Neptune ainsi que les arcs de celleci. Il donne à ces arcs les noms de Liberté, Égalité et Fraternité. Il a fait partie des équipes des sondes Cassini et Voyager et est un des spécialistes mondiaux du système solaire. 

Bradford Smith, lui aussi astrophysicien, a été professeur aux universités de l’Arizona et d’Hawaii. Il a dirigé l’équipe imagerie de la sonde Voyager et est le découvreur du disque autour de Bêta Pictoris, apportant la preuve de l’existence de systèmes planétaires hors de notre système solaire. 

Il y a quelques siècles, les hommes croyaient qu’ils étaient au centre de l’Univers et que notre monde avait tout juste 6 000 ans. Au début du XXe siècle, la découverte des galaxies faisait de la Voie lactée une galaxie parmi des milliards d’autres. Et aujourd’hui, nous le savons, nous vivons dans un Univers en expansion depuis 13,7 milliards d’années, autour d’une petite étoile dans la périphérie d’une galaxie standard et sur une petite planète ni trop loin ni trop proche de notre Soleil. Les découvertes les plus récentes laissent penser qu’il y a plus de planètes que d’étoiles dans l’Univers. D’où vient la vie sur notre Terre ? Sommes-nous seuls dans l’Univers ? À l’heure où des sondes parcourent le système solaire pour fournir des données aidant à mieux en comprendre l’origine et les développements fantastique de la biologie moléculaire, les vieilles questions se posent avec une nouvelle acuité. 

À tous ceux qui s’interrogent sur la vie dans l’Univers, les deux astrophysiciens apportent à travers ce livre merveilleusement illustré les dernières réponses venues de la science.
En six chapitres, les deux chercheurs font le point sur les connaissances scientifiques dans le domaine, depuis l’origine de l’Univers jusqu’aux dernières découvertes sur l’origine de la vie. Du mythe à la réalité, on découvre l’histoire de ces questions qui traversent les siècles et les civilisations. 

Présent à l’université d’été du PCF l’an dernier, André Brahic nous a fait part de sa volonté de voir la recherche et la culture scientifique redevenir un enjeu majeur pour notre pays. Avec ce dernier livre, il contribue à diffuser les connaissances les plus récentes et à rappeler avec force l’importance de la recherche. 


La Planète des hommes. Réenchanter le risque 

GÉRARD BRONNER, 

PUF, 2014, 156 p. 

n92Gérald Bronner nous donne de nouveau, après la Démocratie des crédules, un texte à contre-courant de l’ambiance et du discours dominants, discours de peur, discours de fin du monde, d’apocalypse, principe de précaution aidant. L’auteur s’appuie sur de nombreux exemples et analyses. Tout y passe, théories du complot, contradiction fondamentale des religions du Livre : « […] question fondamentale : pourquoi notre temps présent est-il si difficile à vivre ? Une autre façon de poser le problème est de savoir comment il est possible que Dieu existe et en même temps que le monde soit si imparfait » (p.18) ; « la langue repasse toujours là où la dent fait mal, disait Lénine ». Bronner met le doigt sur ce qu’il nomme antropophobie : « Il serait passionnant d’explorer l’idée que dans notre civilisation occidentale dominante pour le moment, la plus haute expression morale consiste à se livrer à une critique radicale et sans concession aucune de ce qui constitue notre identité » (p. 32). Bronner mène une critique sévère et fortement argumentée de l’écologie radicale ; il montre comment ce n’est que par la science et la technologie, en acceptant de prendre des risques calculés, que l’humanité assure sa pérennité. Enfin il pose la question iconoclaste de savoir, si on refuse le risque de faire, quel est le risque de ne pas faire ? 


Environnement  Risques & Santé/ERS 

Vol. 14, no 2, mars-avril 2015,
Société savante française de santé environnementale 

n94Nous pensons utile de porter à la connaissance des lecteurs cette revue qui traite d’un sujet devenu essentiel. C’est la revue officielle de la Société savante française de santé environnementale (SFSE) qui traite de ces questions en pleine actualité : l’analyse des risques, l’impact environnemental sur la santé humaine, les modifications climatiques et la santé, les effets des antennes de téléphone ou des pesticides, les conditions de travail en lien avec les situations sociales, les polluants chimiques dans l’eau ou les particules dans l’air… 

À travers le nouveau plan national santé environnement, de graves questions scientifiques et politiques sont posées.
Ce numéro traite à la fois du rôle des lobbies, de l’exposition au bruit, du coût de la pollution atmosphérique pour le système de soin français ou encore du sens des mots « pesticides » et « produits phytosanitaires ». 

C’est une revue scientifique, donc pas toujours simple à lire, mais qui nous donne beaucoup d’informations utiles dans le domaine environnemental. Sachons, par exemple, que le coût de la pollution de l’air est estimé dans un intervalle de 1 à 2 milliards d’euros/an, soit autour de 20 % du « déficit » de 2012 pour la branche assurance maladie du régime général de la sécurité sociale. 


Nature à vendre. Les limites des services écosystémiques
VIRGINIE MARIS,
Quæ, « Sciences en question », 2014. 94 p. 

Au moment où tout est transformé en marchandise, y compris la biodiversité, le travail présenté dans cet ouvrage fait le point sur les vrais problèmes en débat. Décidemment, ces éditions Quæ sont très instructives. 

n93Virginie Maris, chercheuse au CNRS, traite lors de conférences-débats des enjeux scientifiques politiques et philosophiques posés par la biodiversité et les « services écosystémiques ».
D’emblée
, elle montre les limites de « la nature à vendre ». Elle met en perspective historique la conception de la nature et l’écologie politique. Le concept de services écosystémiques, qui date de la fin des années 1970, est loin d’être simple et met en jeu de nombreuses contradictions (elles sont très bien présentées). Puis on rentre dans la question de la quantification de la nature et du concept de valeur. Enfin, c’est le bilan de la marchandisation de la nature qui est dressé : le « marché » se rend compte que la biodiversité peut être une opportunité financière, et on passe de la logique de consommation de la biodiversité à la gestion marchande des services écosystémiques ! 

L’exemple des banques de compensation pour les activités destructrices de la biodiversité est bienvenu. L’auteure ne manque pas de rappeler Marx pour étayer la mise en cause de cette marchandisation. 

C’est un appel à « reconsidérer les relations entre les sociétés humaines et la nature ». Surtout si on considère, avec l’auteure, que « la marchandisation de la nature accentue les injustices produites par les logiques d’échanges néolibérales fondées sur la propriété individuelle, les marchés et la financiarisation ». 

La discussion qui suit à partir de questions comme celles du service public, de l’écologie fonctionnelle, du « compromis » entre anthropocentrisme et écocentrisme, de la valeur intrinsèque ou instrumentale de la nature… permet « de penser les choses autrement pour essayer de réfléchir aux causes de la crise et pour découvrir d’autres trajectoires ». 

D’où l’intérêt pour les lecteurs de notre revue de prendre connaissance de ce livre. 

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