Née dans une famille bourgeoise de l’Aisne, celle qui s’appelle encore Suzanne Gros épouse en 1897 le dermatologue Henri Pertat (en 1919, un an après la mort de son premier mari, elle épousera le docteur André Noël). La jeune femme – mariée à dix-neuf ans ! – s’intéresse très vite à la discipline exercée par son mari ainsi qu’à la chirurgie. À une époque où une femme ne peut s’investir dans des études de son propre chef, il lui faudra l’autorisation de son mari pour s’inscrire au baccalauréat puis, en 1905, pour poursuivre ses études. Elle se forme à partir de 1908 à la chirurgie maxillo-faciale, ce qui lui permet, en 1912, de reprendre le lifting raté de Sarah Bernhardt.

Elle se spécialise par la suite dans la chirurgie réparatrice et formatrice. Nous sommes en 1916, et ceux que l’on appelle les « gueules cassées » reviennent du front. Elle s’attelle alors à leur reconstruction faciale : redonner un visage à ces hommes, c’est leur permettre d’accéder de nouveau à une vie sociale normale. Car, n’en déplaise aux détracteurs qui discréditent la chirurgie esthétique en la taxant de frivolité, Suzanne en défend le rôle social. Elle souhaite d’ailleurs que chacun puisse y accéder et fait payer les soins en fonction du revenu de sa patientèle, aussi intervient-elle parfois gratuitement.

Touchée par la cataracte en 1936, elle ralentit son activité, mais continue de prendre soin des autres, en changeant l’apparence de résistants ou encore de juifs recherchés par les nazis puis, à la Libération, en intervenant auprès des rescapés des camps. C’est aussi la période où elle voyage à travers le monde afin de transmettre son savoir et ses techniques chirurgicales. Elle léguera aussi en héritage son engagement pour les femmes en fondant des sections du club service Soroptimist International (club de solidarité féminine) d’abord en France puis partout dans le monde.