Cet article est la traduction d’un article de Bloomberg publiĂ© en anglais et disponible ici : https://www.bloomberg.com/news/articles/2022-02-28/germany-mulls-extending-coal-phaseout-to-wean-off-russian-gas
*Angela Cullen est rédactrice à Bloomberg ; Birgit Jennen est journaliste
L’Allemagne se prĂ©pare Ă prolonger l’utilisation du charbon alors que le pays cherche Ă rĂ©duire sa dĂ©pendance Ă l’Ă©gard de l’Ă©nergie russe au lendemain de l’invasion de l’Ukraine par Moscou.
Les centrales au charbon pourraient fonctionner au-delĂ de 2030 – date Ă laquelle l’Allemagne vise actuellement la fin de ce combustible – mais l’objectif ultime est une plus grande indĂ©pendance Ă©nergĂ©tique grĂące aux Ă©nergies renouvelables, a dĂ©clarĂ© Robert Habeck, vice-chancelier et ministre de l’Ă©conomie et de l’Ă©nergie.
« La politique Ă©nergĂ©tique est une politique de sĂ©curité », a rajoutĂ© M. Habeck lundi avant des entretiens avec ses homologues de l’Union europĂ©enne. « Le renforcement de notre souverainetĂ© Ă©nergĂ©tique renforce notre sĂ©curitĂ©. Par consĂ©quent, nous devons d’abord surmonter la forte dĂ©pendance aux importations russes de combustibles fossiles – un belliciste n’est pas un partenaire fiable. »
L’Allemagne, qui achĂšte la moitiĂ© de son gaz Ă la Russie, a connu un changement rapide de politique en rĂ©action Ă l’assaut sur l’Ukraine. ParallĂšlement Ă une augmentation massive des dĂ©penses de dĂ©fense, le chancelier Olaf Scholz a annoncĂ© dimanche des plans pour construire deux nouveaux terminaux de gaz naturel liquĂ©fiĂ©, signalant un rĂ©alignement Ă plus long terme du secteur Ă©nergĂ©tique allemand.
Avant mĂȘme l’invasion, M. Scholz a interrompu le processus de certification du gazoduc Nord Stream 2, construit pour acheminer davantage de gaz russe directement en Allemagne en Ă©vitant le transit par l’Ukraine.
   Â
L’Allemagne envisage dĂ©sormais des mesures Ă court et Ă long terme pour protĂ©ger son marchĂ© de l’Ă©nergie contre une Ă©ventuelle coupure brutale du gaz russe. M. Habeck, l’ancien co-leader du parti antinuclĂ©aire des Verts, a mĂȘme assurĂ© qu’il n’Ă©tait pas « idĂ©ologiquement opposé » Ă la prolongation de l’utilisation des derniers rĂ©acteurs du pays, mais que la sĂ©curitĂ© Ă©tait une prĂ©occupation.
« Il n’y a pas de tabou », a-t-il poursuivi a dans une interview accordĂ©e dimanche en fin de journĂ©e Ă la chaĂźne de tĂ©lĂ©vision publique allemande ARD. « La vĂ©ritable voie vers l’indĂ©pendance en termes de politique Ă©nergĂ©tique consiste en fait Ă sortir progressivement des combustibles fossiles. Le soleil et le vent n’appartiennent Ă personne ».
Le ministĂšre de l’Ă©conomie propose que l’Allemagne produise toute son Ă©lectricitĂ© Ă partir de sources renouvelables d’ici 2035, soit 15 ans plus tĂŽt que prĂ©vu initialement, selon un tweet d’un responsable du ministĂšre.
Cette refonte de l’Ă©nergie bĂ©nĂ©ficie d’un large soutien au sein de la coalition au pouvoir en Allemagne. Dimanche, le ministre des finances Christian Lindner, membre du FDP, favorable aux entreprises, a qualifiĂ© l’Ă©nergie renouvelable d' »énergie de la liberté », car elle permettrait de rĂ©duire la dĂ©pendance Ă l’Ă©gard de la Russie, et a dĂ©clarĂ© qu’il soutenait les efforts visant Ă dĂ©velopper l’hydrogĂšne et les carburants synthĂ©tiques.
« Je demande instamment que nous revoyions notre politique Ă©nergĂ©tique Ă©trangĂšre », avança-t-il dans une interview accordĂ©e Ă la chaĂźne de tĂ©lĂ©vision allemande ARD dimanche dernier. « C’est aujourd’hui d’autant plus urgent ».
Choisir à son gré
L’Allemagne veut atteindre un point oĂč elle peut « choisir Ă son grĂ© les pays avec lesquels elle veut Ă©tablir des partenariats Ă©nergĂ©tiques », expliqua le ministre allemand de l’Ă©conomie et de l’Ă©nergie Ă l’ARD. « Pouvoir choisir signifie aussi que l’on peut devenir indĂ©pendant du gaz, du charbon ou du pĂ©trole russe ».
Tandis que l’Allemagne peut se passer du gaz russe pour les mois Ă venir, le pays devra diversifier considĂ©rablement sa stratĂ©gie de fourniture pour l’hiver prochain, a-t-il dĂ©clarĂ©. Selon lui, le charbon pourrait aider Ă compenser l’utilisation du gaz russe, mais dĂ©pendre du combustible fossile le plus polluant prĂ©sente Ă©galement ses propres risques pour la sĂ©curitĂ©.
« Fonctionner plus longtemps signifie une dĂ©pendance plus longue au charbon, peut-ĂȘtre aussi en provenance de Russie. Ou nous l’obtenons ailleurs », a-t-il soulignĂ©. « Mais c’est une autre forme de dĂ©pendance ».
La ministre des Affaires Ă©trangĂšres Annalena Baerbock – Ă©galement ancienne co-leader des Verts allemands – affirme de son cĂŽtĂ© qu’une utilisation prolongĂ©e du charbon est « le prix que nous devons tous payer pour cette guerre ».
Le nuclĂ©aire ne sera probablement pas une solution Ă court terme, puisque les trois derniers rĂ©acteurs du pays sont dĂ©jĂ en cours d’arrĂȘt.
C’est en tout cas ce qu’affiche le ministre Habeck : « Les prĂ©paratifs de la fermeture sont Ă un stade si avancĂ© que les centrales atomiques ne pourraient ĂȘtre exploitĂ©es plus longtemps que dans le cadre des plus hautes prĂ©occupations en matiĂšre de sĂ©curitĂ© et Ă©ventuellement avec un approvisionnement en combustible qui n’a pas encore Ă©tĂ© sĂ©curisĂ©[…]. Ce n’est certainement pas quelque chose que nous souhaitons ».