“Tout est nombre”*, Ivan Lavallée

*Assertion attribuée à Pythagore.

Venant du fin fond de l’histoire, comme en témoigne ce titre, portée par les sciences et les techniques modernes, c’est de la révolution numérique que nous traitons ici et des sauts scientifiques et technologiques dont elle est porteuse. Les outils en sont les ordinateurs et les disciplines scientifiques associées, les mathématiques et l’informatique. Si une société se caractérise par la façon dont les marchandises y sont produites et échangées, la révolution numérique en cours va être centrale, et il convient d’en prendre la mesure ainsi que d’évaluer les potentialités dont elle est porteuse dans la perspective d’une société communiste comme instance de dépassement du capitalisme.

La France possède des atouts maîtres pour jouer un rôle majeur en la matière. La société Bull est la seule en Europe capable de construire les superordinateurs indispensables à l’industrie à venir. Seuls quatre autres pays au monde le peuvent(1). Cette position de la France est menacée par le caractère privé de nos entreprises stratégiques qui ne sont – en « bonne doxa » économique libérale – que des marchandises comme les autres, donc susceptibles d’être vendues au plus offrant, comme en témoigne l’affaire Alstom livrée à la CGE…

Nous entrons dans un mode de production avec des outils et des concepts qui permettent de libérer la force de travail humaine des tâches ingrates, et plus particulièrement d’abolir le travail aliéné. En d’autres termes, un autre mode de production à la création de valeur, libérant la créativité et le travail humain, est possible et devient de plus en plus nécessaire. L’enjeu est clair : « McAfee prédit que, si les innovations technologiques généreront des gains de productivité massifs par l’automatisation de plus en plus d’emplois, elles créeront aussi un chômage technologique de masse(2). » Il s’agit bien là de savoir si ces gains de productivité doivent permettre une explosion des profits et du chômage ou au contraire la baisse massive du temps de travail aliéné et l’appropriation sociale.

Le développement impétueux de ces nouvelles forces productives oblige le capital international à se reconfigurer, et pas seulement au plan financier. L’industrie à venir, c’est-à-dire là où se crée la valeur, sera structurée par la révolution numérique. L’ampleur de ces changements conduit l’industrie à s’organiser au plan mondial par domaines d’activités (aéronautique, informatique, construction navale, finance…) alors que l’organisation politique et culturelle de la planète est territoriale. Il y a là matière à réflexion pour le mouvement révolutionnaire.

IVAN LAVALLÉE est membre du comité de rédaction de Progressistes. Il est professeur des universités.

(1) Chine, Japon, Russie, États-Unis.

(2) Andrew McAfee est directeur de recherche au MIT. Citation de « Ralentir les innovations technologiques serait immoral », in Le Monde eco&entreprise

Une réflexion sur ““Tout est nombre”*, Ivan Lavallée

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