Nous publions cet article de Sylvestre Huet, paru dans le N° 204 de Raison prĂ©sente, la revue de lâUnion rationaliste. Lâauteur pointe une dimension peu souvent traitĂ©e: la responsabilitĂ© individuelle de trois catĂ©gories dâacteurs sociaux â scientifiques, journalistes, responsables politiques â impliquĂ©s dans la diffusion des savoirs et la construction sociale de lâignorance. Â
*Sylvestre HUET est journaliste scientifique.
La construction de lâignorance sociale procĂšde pour lâessentiel de mĂ©canismes collectifs : intĂ©rĂȘts Ă©conomiques et financiers, stratĂ©gies politiques, aveuglements communs sur la base dâidĂ©ologies partagĂ©es ou de processus psychologiques classiques⊠Il y a lĂ de nombreux sujets possibles de travaux scientifiques et universitaires. Toutefois, un aspect demeure peu traitĂ©, celui de la responsabilitĂ© individuelle des acteurs sociaux concernĂ©s par cette construction aux effets dĂ©lĂ©tĂšres sur la santĂ© politique de nos sociĂ©tĂ©s. Il est vrai que le name and shame («nommer et faire honte») ne fait guĂšre partie des traditions europĂ©ennes, et encore moins de la communautĂ© scientifique ou mĂ©diatique. Suivent quelques rĂ©flexions dâun praticien.
Depuis 2000 est publiĂ©e annuellement une enquĂȘte sociologique de lâADEME (Agence de lâenvironnement et de la maĂźtrise de lâĂ©nergie) rĂ©alisĂ©e auprĂšs des Français sur le changement climatique (1).
Parmi les questions posĂ©es, lâune portait sur la perception de rĂ©sultats scientifiques (voir TABLEAU 1). On remarquera que, en 2009, 70 % des Français choisirent la premiĂšre et bonne rĂ©ponse, et seulement 28 % la seconde et mauvaise. Or, en 2010, Ă la mĂȘme question seuls 51 % des Français cochaient la premiĂšre rĂ©ponse, et 45 % la seconde. Six ans plus tard, en 2016, les pourcentages Ă©taient respectivement de 59 % et 41 %, alors que les faits scientifiquement Ă©tablis, comme lâobservation de lâĂ©volution du climat planĂ©taire, avaient non pas affaibli mais, Ă lâinverse, renforcĂ© le diagnostic des climatologues entre 2009 et 2016, comme le soulignait la publication en 2014 du cinquiĂšme rapport (2) du GIEC (Groupe dâexperts intergouvernemental sur lâĂ©volution du climat).

LâIGNORANCE AU SENS PROPREÂ
Il est bien sĂ»r possible de trouver, dans le corps mĂȘme de lâenquĂȘte de lâADEME, des raisons structurelles Ă ces rĂ©ponses qui peuvent dĂ©concerter les scientifiques, puisque les rapports du GIEC, depuis 1990, sont censĂ©s avoir transmis aux gouvernements et aux populations leur pronostic de lâĂ©volution du climat. Ces raisons structurelles relĂšvent dâune autre sorte dâignorance que celles traitĂ©es dans ce numĂ©ro de Raison prĂ©sente.
Il ne sâagit pas de lâignorance construite dĂ©libĂ©rĂ©ment par la nĂ©gation du savoir constituĂ© dans le cadre de stratĂ©gies sociales Ă buts financiers ou idĂ©ologiques, mais simplement de lâignorance au sens commun du terme, celle qui fait quâun enfant dâĂ©cole primaire ne sait pas rĂ©soudre une Ă©quation du second degrĂ©.
Les traces de cette ignorance « simple » sont claires dans cette enquĂȘte. Ainsi, seule une petite minoritĂ© de Français rĂ©pond correctement aux questions leur demandant dâexpliquer ce quâest lâeffet de serre. Plus amusant, ou plutĂŽt ironique au pays de lâĂ©lectronuclĂ©aire massif, 53 % des Français sont persuadĂ©s en 2014 que les centrales nuclĂ©aires contribuent beaucoup ou assez â et non peu ou pas du tout â Ă lâeffet de serre (voir TABLEAU 2). Ces deux points, surtout le second, ne font pas vraiment lâobjet de campagnes visant Ă construire une ignorance sociale. On pourrait donc imaginer quâil y a lĂ â dans cette ignorance de ce quâest lâeffet de serre dans sa reprĂ©sentation la plus simple â une explication majeure, pĂ©renne et stable, Ă ce taux Ă©levĂ© de Français estimant quâattribuer le rĂ©chauffement de lâatmosphĂšre Ă lâaugmentation de lâeffet de serre nâest quâ«une hypothĂšse sur laquelle les scientifiques ne sont pas tous dâaccord».

UN BASCULEMENT MESURABLE PAR LA SOCIOLOGIE
Mais comment, alors, expliquer le bond de la mauvaise rĂ©ponse en 2010, au point que, six ans aprĂšs, les mauvaises rĂ©ponses demeurent plus Ă©levĂ©es quâen 2009 ? Il faut manifestement invoquer un Ă©vĂ©nement susceptible dâavoir influencĂ© lâopinion publique, capable de provoquer un tel basculement perceptible et mesurable par les techniques de la sociologie.
Cet Ă©vĂ©nement est connu: câest la campagne climatosceptique conduite, pour la France, par Claude AllĂšgre et Vincent Courtillot.
Les sociologues spĂ©cialistes de la communication ont souvent prĂ©tendu que les moyens mĂ©diatiques de cette campagne Ă©taient modĂ©rĂ©s, que la plupart des articles de presse consacrĂ©s au sujet sur cette pĂ©riode ne reprenaient pas les thĂšmes climatosceptiques (3). Il y a lĂ , probablement, une erreur de mesure. Elle consiste non pas, pour lâessentiel, Ă mal mesurer le nombre dâexemplaires vendus (plus de 100 000) du livre de Claude AllĂšgre lâImposture climatique, ou lâaudience des Ă©missions de tĂ©lĂ©vision et de radio oĂč les deux personnages ont pu sâexprimer, ou lâeffet du soutien affirmĂ© par des journaux comme le Point, ou encore la frĂ©quentation des sites internet climatosceptiques.
En rĂ©alitĂ©, lâerreur consiste Ă croire que lâefficacitĂ© argumentative se mesure Ă la quantitĂ© de papiers ou au nombre de minutes Ă la tĂ©lĂ©vision. Or, auprĂšs dâune population ne maĂźtrisant pas les donnĂ©es scientifiques de base dâun sujet, un mensonge simple sera toujours beaucoup plus efficace quâune explication honnĂȘte dâune vĂ©ritĂ© complexe, fondĂ©e sur une science a priori hermĂ©tique, comme toutes les sciences (si elles ne lâĂ©taient pas, tous les Ă©tudiants auraient 20 sur 20 en physique, chimie, maths, biologie ou gĂ©ologie en premiĂšre annĂ©e dâuniversitĂ©).
Les mĂȘmes sociologues nâont aucune explication alternative Ă opposer Ă celle avancĂ©e ici pour Ă©clairer lâĂ©volution brutale de lâopinion publique rĂ©vĂ©lĂ©e par lâenquĂȘte de lâADEME. Il ne sâest rien passĂ© dâautre sur ce sujet en 2010, les dĂ©cisions de la COP15 relevant de la politique, et non dâun discours sur la science du climat et ne marquant dâailleurs pas dâinflexion relativement Ă la pĂ©riode prĂ©cĂ©dente. On peut mĂȘme relever quâen 2010 les discours de la plupart des responsables politiques français, dont celui du prĂ©sident Nicolas Sarkozy, ne faisaient montre dâaucune dĂ©fiance vis-Ă - vis du diagnostic scientifique.

DĂNONCER LA FALSIFICATION
La responsabilitĂ© de Claude AllĂšgre et de Vincent Courtillot est donc clairement engagĂ©e dans cette Ă©volution, qui ne peut que freiner la prise des dĂ©cisions nĂ©cessaires pour affronter le dossier du changement climatique, tant pour attĂ©nuer sa menace que pour sâadapter aux changements inĂ©luctables. A-t- elle Ă©tĂ© dĂ©noncĂ©e avec des mots suffisants ? Jâai pu vĂ©rifier Ă quel point il Ă©tait difficile, pour la plupart des spĂ©cialistes du climat, dâutiliser les mots durs mais vrais pour qualifier leurs discours. MĂȘme lorsque Claude AllĂšgre est pris la main dans le sac dâune falsification grossiĂšre de donnĂ©es scientifiques (voir graphique ci-dessus) publiĂ©es dans une revue Ă comitĂ© de lecture, il faut insister lourdement pour que les mots soient prononcĂ©s.
Pour la petite histoire, la dĂ©nonciation de la falsification par la premiĂšre victime â le palĂ©oclimatologue suĂ©dois HĂ„kan Grudd, auteur de la courbe falsifiĂ©e â nâa pas Ă©tĂ© si facile que cela Ă obtenir (4). Il mâa fallu activer lâintervention en chaĂźne dâun professeur au CollĂšge de France et dâune scientifique suĂ©doise pour que HĂ„kan Grudd accepte de faire ce geste public.
Lorsque Vincent Courtillot publie, deux fois de suite, un calcul grossiĂšrement erronĂ© de la comparaison de lâeffet climatique dâune variation dâactivitĂ© solaire et dâune intensification de lâeffet de serre (erreur qualifiĂ©e Ă juste titre de « Terre noire et plate », car le calcul « oublie » la rotonditĂ© de la Terre et son albĂ©do), aucun scientifique ne demande la rĂ©traction des articles publiĂ©s dans Earth and Planetary Science Letters (5), ce qui serait pourtant une issue normale dans un tel cas, dâautant plus que dans ces mĂȘmes deux articles lâauteur publie un graphique oĂč les courbes multiplient les erreurs de rĂ©fĂ©rencement et de paramĂštres gĂ©ophysiques reprĂ©sentĂ©s. RĂ©cemment, des articles de biologistes ont Ă©tĂ© rĂ©tractĂ©s pour avoir « poussĂ© » un peu des illustrations afin dâen renforcer une dĂ©monstration. Le pĂ©chĂ© nâĂ©tait pas vĂ©niel, mais clairement moins grand que pour les articles dont Vincent Courtillot Ă©tait signataire.
La pusillanimitĂ© de la communautĂ© scientifique dans cette affaire est peu comprĂ©hensible et nâa pas aidĂ© les journalistes qui le souhaitaient Ă faire correctement leur mĂ©tier. Câest seulement aprĂšs le succĂšs de lâinitiative dâune pĂ©tition (6) â lancĂ©e dâailleurs plus par les quadragĂ©naires de laboratoires des sciences du climat que par les chefs de file â que nombre de journalistes ont pu plaider avec succĂšs auprĂšs de leurs rĂ©dactions en chef la cause du respect de la vĂ©ritĂ© scientifique contre la volontĂ© de « monter en Ă©pingle » un faux dĂ©bat, dĂ©marche classique et commerciale pour une presse dirigĂ©e par des journalistes issus en gĂ©nĂ©ral des services politiques.
LA RESPONSABILITĂ DES JOURNALISTES
Il serait toutefois peu efficace de limiter le name and shame aux scientifiques coupables de dĂ©former la mĂ©thode et les rĂ©sultats de la science auprĂšs du grand public. Lâeffet de ces actes aurait Ă©tĂ© bien moindre sans le relais, et lâappui, de personnes en situation de pouvoir et de responsabilitĂ© dans les mĂ©dias.
Ainsi, il nâest pas possible de comprendre lâaudience du discours climatosceptique sans se remĂ©morer le passage de Vincent Courtillot au Journal tĂ©lĂ©visĂ© (JT) de 20 heures de France 2, le 9 novembre 2009 (7). Ă la demande expresse de David Pujadas, alors prĂ©sentateur mais aussi rĂ©dacteur en chef du JT, un montage oppose artificiellement Jean Jouzel et Vincent Courtillot. Il est prĂ©sentĂ© par David Pujadas comme un exemple de ce que « les scientifiques ne sont pas tous dâaccord », alors que « la tempĂ©rature est stable depuis dix ans sur Terre », insiste t- il. Dans ses interventions, Vincent Courtillot multiplie les erreurs, affirmant ainsi que le rythme de la montĂ©e du niveau marin nâa pas variĂ© depuis le dĂ©but du XXe siĂšcle â or il a au moins doublĂ© (8) dâaprĂšs les spĂ©cialistes du LEGOS (Laboratoire dâĂ©tudes en gĂ©ophysique et ocĂ©anographie spatiales) Ă Toulouse â ou que la tempĂ©rature planĂ©taire suit le rythme des cycles de onze ans du Soleil, ce qui est tout simplement faux.
Dans cette affaire, la responsabilitĂ© personnelle de David Pujadas est Ă©crasante, car il a fait rĂ©aliser cette double interview contre lâavis du journaliste de la rĂ©daction spĂ©cialisĂ© en sciences. Niant la compĂ©tence professionnelle de son collĂšgue, il a confiĂ© cette interview Ă un autre journaliste et commandĂ© un montage avec une orientation dont le rĂ©sultat final tĂ©moigne.
Or rien ni personne nâa exigĂ© de David Pujadas quâil prenne cette dĂ©cision; elle lui revient entiĂšrement, et sa carriĂšre nâeĂ»t pas Ă©tĂ© sensiblement diffĂ©rente sâil ne lâavait pas prise. Sâexplique t- elle uniquement par lâincompĂ©tence du rĂ©dacteur en chef ? par la volontĂ© de dicter un rĂ©sultat dâenquĂȘte avant quâelle ait eu lieu (pĂ©chĂ© rĂ©pandu) ? ou par lâidĂ©e quâen sâĂ©cartant dâune doxa â un discours consensuel â il ferait la preuve de son originalitĂ© ? Il est difficile de le savoir, mais aucune de ces explications possibles ne peut attĂ©nuer sa responsabilitĂ© personnelle.
ABANDON DES PRINCIPES DĂONTOLOGIQUES
La mĂȘme dĂ©monstration pourrait ĂȘtre faite pour lâĂ©mission de Guillaume Durand sur la chaĂźne de tĂ©lĂ©vision France 5, qui dĂ©roula le tapis rouge Ă Claude AllĂšgre. Cela sâest reproduit avec des animateurs Ă la radio, ainsi quâĂ la rĂ©daction en chef de lâhebdomadaire lePoint, qui dut, lĂ aussi, Ă©craser la compĂ©tence professionnelle du journaliste spĂ©cialisĂ© en sciences de lâĂ©quipe rĂ©dactionnelle, ce qui se termina par un refus de signature â geste rĂ©vĂ©lateur dâun grave problĂšme dĂ©ontologique.
Ces rĂ©alitĂ©s interrogent la responsabilitĂ© personnelle des journalistes, le fonctionnement des rĂ©dactions, les raisons de tels dĂ©rapages, souvent en relation directe ou indirecte avec lâĂ©volution des structures Ă©conomiques dâune presse aux abois. Parmi les signes indubitables de cette crise, il faut relever la diminution du nombre de journalistes en activitĂ©, rĂ©vĂ©lĂ©e par le nombre de cartes de presse distribuĂ©es par la CCIJP (Commission de la carte dâidentitĂ© des journalistes professionnels) : aprĂšs avoir atteint un pic Ă 37390 en 2009, le nombre nâest plus que 35047 en 2017 (9). Cette chute, dans une sociĂ©tĂ© qui se veut « de la connaissance », renforce la remarque de Pierre Bourdieu sur ces journalistes : forts collectivement mais faibles individuellement. Le contexte socio-Ă©conomique pĂšse sur les individus, favorise les conduites de soumission et lâabandon des principes dĂ©ontologiques.
Lâexemple du dossier climatique nâest quâun parmi dâautres oĂč la nĂ©gation des rĂ©sultats et des mĂ©thodes de la science est grosse de pĂ©rils pour la sociĂ©tĂ©.
Lorsquâon apprend que des scientifiques ont acceptĂ© contre rĂ©munĂ©ration de jouer les auteurs fantĂŽmes pour le compte dâindustriels comme Monsanto sur des sujets liĂ©s Ă la santĂ© publique, on ne peut que frĂ©mir, et sâinterroger sur le peu de rĂ©action des communautĂ©s scientifiques concernĂ©es.
Lorsquâon lit attentivement les articles consacrĂ©s Ă une publication scientifique qui fait la une, on est un peu effarĂ© de constater que plus de 95 % des auteurs de ces articles nâont manifestement pas lu la publication en question: câest, par exemple, le cas pour celle par laquelle Gilles Ăric SĂ©ralini affirmait avoir dĂ©montrĂ© lâeffet sanitaire dĂ©vastateur du Roundup et du maĂŻs modifiĂ© pour supporter le glyphosate.
Le dĂ©bat public en cours sur la vaccination est ainsi polluĂ© par des prises de parole de quelques scientifiques, eux aussi bĂ©nĂ©ficiant dâune exposition mĂ©diatique efficace et dĂ©mesurĂ©e, qui nâhĂ©sitent pas Ă diffuser des idĂ©es fausses sur ce sujet majeur pour la santĂ© publique, avec des rĂ©sultats qui pourraient ĂȘtre dĂ©vastateurs. Mais, sur ce sujet, des professionnels soucieux de leurs responsabilitĂ©s sociales peuvent agir avec efficacitĂ© comme le montrent les articles des DĂ©codeurs du Monde sur les vaccins (10).
DĂCOURAGER LES MENTEURS
LâĂ©clairage que je propose de ce sujet â la construction de lâignorance â pourrait sembler anecdotique, faire trop de cas dâune approche sartrienne, fondĂ©e sur la responsabilitĂ© individuelle, au dĂ©triment des ressorts collectifs des Ă©volutions de la conscience commune. Je nâaurais garde dâen faire le moteur principal de ces Ă©volutions. Le premier facteur demeure lâignorance « simple », qui est la chose au monde la plus partagĂ©e â et non pas le bon sens, comme le croyait Descartes, lequel bon sens est rarement efficace pour comprendre les phĂ©nomĂšnes naturels et constitue la base sur laquelle sâĂ©difie lâignorance construite, expliquant sa force.
Parmi les moteurs Ă identifier, la responsabilitĂ© des dirigeants politiques est majeure. Pas seulement lorsque, comme Nicolas Sarkozy lors de sa tentative ratĂ©e de gagner la primaire de la droite pour lâĂ©lection prĂ©sidentielle de 2017, ce dernier sâest mis Ă virer climatosceptique, Ă rebours de son discours en 2009, en espĂ©rant rallier des votes conservateurs. Plus profondĂ©ment, les sociologues ont dĂ©montrĂ© comment le discrĂ©dit du personnel politique rejaillit sur toute parole « officielle », mĂȘme lorsquâelle provient dâun processus dâexpertise aussi compĂ©tent et sincĂšre que celui du GIEC.
Lorsque des Ă©lus jettent le doute sur des expertises correctement conduites, comme celles de lâIRSN (Institut de radioprotection et de sĂ»retĂ© nuclĂ©aire) et de lâASN (AutoritĂ© de sĂ»retĂ© nuclĂ©aire) sur les dĂ©fauts de la cuve de lâEPR, le dĂ©bat public devient impossible. Cela est dâautant plus dommageable que tous les systĂšmes dâexpertise publique ne sont pas parfaits, voire peuvent se rĂ©vĂ©ler gravement dĂ©faillants, comme lâa montrĂ© lâexemple rĂ©cent du Mediator, ou bien ne sont pas utilisĂ©s par les pouvoirs publics pour gĂ©rer les risques sanitaires, comme dans la crise de lâamiante. Pour corriger les processus dâexpertise dĂ©faillants, il est nĂ©cessaire de soutenir et de sâinspirer de ceux qui fonctionnent correctement. Câest pourquoi il faut condamner fermement toute parole politique qui rĂ©cuse une expertise correctement rĂ©alisĂ©e.
Toutefois, sâil semble impossible dâagir rapidement et avec succĂšs sur le niveau dâĂ©ducation des populations, sur la diffusion des savoirs scientifiques ou sur le fonctionnement de nos systĂšmes politiques et les comportement des dirigeants â bien quâil y ait lĂ des combats dĂ©cisifs, de longue durĂ©e, pour le progrĂšs social et humain â, lâaction contre les fabricants dâignorance ne doit pas ĂȘtre nĂ©gligĂ©e. Et lâefficacitĂ© de cette action suppose, Ă mon avis et dâexpĂ©rience, de ne pas hĂ©siter devant la douloureuse nĂ©cessitĂ© du name and shame.
Pour que ce processus soit efficace, il doit bien entendu Ă©viter lâargument ad hominem. Ce ne sont pas les individus en tant que personnes humaines qui sont ainsi combattus, mais uniquement leurs discours et uniquement en ce quâils ne respectent ni les rĂ©sultats ni les mĂ©thodes de la science. Cette action doit se mener au nom des valeurs de la recherche scientifique, des valeurs du journalisme comme acteur de la dĂ©mocratie, et de la dĂ©mocratie tout court lorsque ce sont des responsables politiques qui sont en cause.
Il faut sây rĂ©soudre : dĂ©courager les menteurs ne peut sâobtenir que si le prix Ă payer pour le mensonge est assez Ă©levĂ©. La communautĂ© scientifique doit dĂ©noncer clairement le mensonge public lorsquâil est le fait dâun de ses membres. La pĂ©tition des climatologues en est un bon exemple, lâattitude de la direction de lâAcadĂ©mie des sciences un trĂšs mauvais⊠Pour les journalistes, il sâagit de ne pas encourager la promotion de ceux qui donnent aide et support aux scientifiques coupables de dĂ©former la science. Quant aux responsables politiques, seuls les Ă©lecteurs peuvent les sanctionner efficacementâŠ
(1) http://www.ademe.fr/representations-sociales-leffet-serre-rechauffementclimatique, sous la direction de Daniel Boy, CEVIPOF.
(2) http://www.ipcc.ch/report/ar5/wg1/
(3) http://www.inatheque.fr/medias/inatheque_fr/fonds_audiovisuels/utilisation_des_fonds/rapport_gis_climat_ifp2012.pdf
(4) http://sciences.blogs.liberation.fr/2010/03/23/claude-allegre-accuse-de-falsification-par-hakan-grudd/
(5) https://www.researchgate.net/publication/222817231_Are_there_connections_between_the_Earthâs_magnetic_field_and_climate
(6) http://sciences.blogs.liberation.fr/2010/04/01/climat-400-scientifiques-signent-contre-claude-allegre/
(7) http://sciences.blogs.liberation.fr/2009/11/16/climat-france2-derape/
(8) https://www.aviso.altimetry.fr/fr/donnees/produits/produits-indicateursoceaniques/niveau-moyen-des-mers.html
(9) http://www.ccijp.net/article-33-cartes-attribuees-en.html
(10) http://abonnes.lemonde.fr/lesdecodeurs/article/2017/08/01/comment-les-vaccins-ont-durablement-fait-reculer-les-maladies_5167442_4355770.html