*Peppino TERPOLILLI est mathématicien et chercheur à Total.
« La dominance des marchĂ©s financiers vient de lâimportance des volumes de transactions qui y sont nĂ©gociĂ©es [âŠ] tout le monde a intĂ©rĂȘt Ă tenir compte de leur prix [âŠ] pour tous les actifs cotĂ©s puisque vendeurs et acheteurs peuvent y faire leurs transactions sâils le veulent.  » Cette citation, extraite du livre rĂ©cent de Nicolas Bouleau, donne la mesure du pouvoir exorbitant octroyĂ© Ă la finance par lâouverture et la dĂ©rĂ©gulation des marchĂ©s.
Mais le poids de la logique financiĂšre sâexerce aussi dans lâĂ©conomie rĂ©elle, lâensemble des entreprises sont en effet tenues de « rĂ©pondre » aux attentes des principaux actionnaires : fonds de pensions, fonds dâinvestissement, etc. Leur unique objectif est la rentabilitĂ© de leurs investissements; ce sont les 15 % de croissance pour les capitaux investis mais aussi, pour des raisons de « transparence », le recentrage des activitĂ©s (vente de filiales), les fusions, la sous-traitance et sa pyramide de domination (1er rang, 2e rang, etc.), et lâaustĂ©ritĂ© salariale gĂ©nĂ©ralisĂ©e qui Ă©pargne uniquement le haut management. Câest surtout le court-termisme qui conduit souvent aux catastrophes sociales : chantage Ă lâinvestissement, prise de contrĂŽle de concurrents pour mieux sâen dĂ©faire⊠Les maux sâabattent comme les plaies dâĂgypte. Cette folle logique perturbe aussi les entreprises de lâĂ©conomie solidaire. La conscience des limites de cette logique apparaĂźt de plus en plus aux acteurs de la vie sociale ainsi quâĂ de nombreux intellectuels critiques : lâenjeu est de faire grandir cette prise de conscience pour construire une alternative.
Nous sommes de plus en plus nombreux Ă vouloir imposer un autre agenda politique pour rĂ©ellement affronter les urgences planĂ©taires. La variĂ©tĂ© des analyses des marchĂ©s financiers doit ĂȘtre mieux partagĂ©e, comme lâapproche systĂ©mique issue de lâĂ©cologie, prĂ©conisĂ©e par Dominique Dron, ou encore lâapproche « transition de phase » de Didier Sornette. Sans nĂ©gliger les travaux qui visent Ă rĂ©pondre aux « difficultĂ©s » des marchĂ©s financiers dans le cadre nĂ©oclassique, ne serait-ce que pour les critiquer.
Le débat libre de tous préjugés est certainement nécessaire pour mieux cerner les problÚmes et éventuellement esquisser des solutions. Notre revue ambitionne de jouer, dans ce domaine aussi, son rÎle de forum démocratique.